UNE VOITURE DANS LA SEINE

Ces jours derniers, un épais brouillard a, à plusieurs reprises, plongé Paris dans une obscurité plus ou moins profonde. Il a été cause de plusieurs accidents. L’un d’eux a entraîné la mort d’une personne. Vers trois heures  et demie, M. Eugène Cadou, âgé de trente-six ans,  garçon de bureau à la Compagnie des tramways de l’Est Parisien et attaché à l’usine d’électricité de Vitry, conduisait la voiture de son directeur, un omnibus de famille. A l’intérieur se trouvait la domestique du directeur de l’usine, Mlle Jeanne Pierrot, âgée de dix-neuf ans. Elle allait chercher les enfants de son maître qui sont en pension.

Sur le siège, à côté du cocher, se trouvait un ami de M. Cadou, nommé Pierre Chazeau. En franchissant la porte de l’usine, sans qu’on sût pourquoi, le cheval prit peur et fit un brusque écart. Le cocher réussit à le maîtriser. Malheureusement, trompé par le brouillard, qui était intense, il ne s’aperçut pas que l’animal s’était engagé dans un chemin conduisant directement à la Seine. Cheval, voiture et voyageurs furent précipités dans le fleuve du haut du chemin de halage. Les deux hommes, MM. Cadou et Chazeau, réussirent à se retirer légèrement contusionnés ; mais Mlle Jeanne Pierrot, enfermée à l’intérieur de l’omnibus, ne put se dégager. Le flot entraîna la voiture et le cheval. Aux cris poussés par les victimes de cet accident, des mariniers et des ouvriers de l’usine électrique accoururent et se livrèrent à des recherches pour sauver l’infortunée jeune fille. Hélas ! tous les efforts restèrent vains. Ce n’est seulement que dans la matinée du lendemain que le cadavre de Mlle Jeanne Pierrot fut retiré de l’eau, ainsi que la voiture et l’attelage.