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Un drame en Seine

Deux personnes noyées

Emile Gérier, âgé de vingt-huit ans et un de ses amis, Jules Gerst, avaient formé le projet de se rendre en canot de Nogent-sur-Marne à Asnières.

Une jeune femme, Melle X… les accompagnait.

La première partie du voyage s’opéra sans encombre; à quatre heures de l’après-midi, l’embarcation arriva à l’écluse de la Monnaie.

Là, plusieurs passants remarquèrent l’allure inquiétante du canot.

Dans la traversée de Paris, par suite de l’élévation des eaux, le courant était fort rapide. Le vent soulevait une lame courte et dure qui fatiguait visiblement la fragile embarcation. Toutefois, le danger ne paraissait pas immédiat, mais il s’accrut en approchant de l’île des Cygnes.

A cet endroit, le fleuve se divise en deux branches et, par suite, le courant redouble de vitesse Le marinier surveillant le ponton des Bateaux parisiens à la passerelle de Passy vit le danger couru par les canotiers, qu’il héla pour les engager à passer dans le bras de la Seine formant le port de Javel. Mais l’avertissement arriva trop tard : la yole était trop engagée pour retourner en arrière.

A ce moment, elle croisa le Bateau parisien n° 15 qui, en approchant de son ponton, fit, selon l’habitude, machine arrière pour faciliter l’amarrage. Il se produisit alors un violent remous. Et la yole, submergée par une vague, s’enfonça rapidement.

Ce que voyant, les canotiers se débarrassèrent à la hâte de leurs vêtements avec l’intention de se jeter à l’eau et de regagner à la nage la rive peu éloignée.

Mais, soudain, la yole alourdie se rompit net dans le sens de la longueur.

Gérier, Gerst et leur compagne furent précipités dans le fleuve.

Les deux hommes s’accrochèrent aux débris de l’embarcation.

Un long cri d’épouvante échappa aux passagers du Bateau parisien

Le pilote Berton lança dans la direction de Gérier la bouée de sauvetage, que celui-ci put heureusement saisir ; un instant après, il était hors de danger

Son camarade Gerst fut, hélas ! moins heureux.

L’infortuné, qui savait nager et aurait pu se tirer d’embarras, en voyant sa compagne en danger de mort avait lâché son épave et s’était élancé au secours de Melle Andrée X…, qu’il put saisir à bras-le-corps et qu’il soutint un instant hors de l’eau.

Pendant que l’on opérait le sauvetage de Gérier, le bateau parisien avait dérivé d’une trentaine de mètres, et pour le rapprocher du théâtre de l’accident, le mécanicien fit machine en arrière.

L’hélice, par sa rapide évolution, provoqua un remous terrible, au milieu duquel disparurent Gerst et la jeune femme.

Aussitôt, l’eau se teinta de rouge, et un instant après Melle Andrée X… reparut seule à la surface.

Le receveur du bateau, M. Eugène Roux, la saisit et la hissa à bord.

La malheureuse jeune femme était horriblement défigurée. L’hélice du Bateau parisien l’avait toute meurtrie. En dépit des soins qui lui furent prodigués, elle rendit bientôt le dernier soupir.

Quant au cadavre de Gerst, il avait été entraîné au loin.

Ce qui ajoute à l’horreur de ce drame, c’est que le soir même, Gerst devait recevoir la visite de sa mère. Celle-ci, qui habite Alsace, venait voir son fils. C’est M. Gérier qui s’est chargé d’annoncer l’horrible deuil qui la frappait à cette mère infortunée.

Exposition temporaire DU 21 OCTOBRE 2023 AU 28 JANVIER 2024 (Passée)