Musée de la batellerie et des voies navigables

L’aquamoteur

La navigation à la remonte, c’est-à-dire contre le courant, s’apparente souvent, on l’a vu, à un parcours d’obstacles ! Cela est particulièrement vrai  lorsqu’un brutal étranglement du lit fluvial, à l’emplacement des gorges naturelles par exemple, entraîne une augmentation violente du courant.

Dans certains cas, le problème peut se compliquer singulièrement s’il devient impossible d’établir un chemin de halage…

L’étranglement de la rivière n’a malheu­reusement pas toujours une origine naturelle. Les villes, anciennes ou modernes, forment en effet souvent d’autres obstacles à la navigation. Elles « étranglent » leur rivière par des constructions qui empiètent sur le lit majeur, par des quais mal conçus et sur­ tout par les ponts massifs qui se multiplient au fil des siècles. Pour résister aux crues, ces derniers présentent des arches étroites et des piles épaisses qui gênent l’écoulement des eaux et créent de véritables « rapides ».

Ces nombreux obstacles qui compli­quaient considérablement, mais surtout qui renchérissaient les coûts des transports, représentaient un enjeu majeur pour le transport fluvial. Il n’est donc pas étonnant de découvrir dans les archives de nom­breux essais ou projets de « machines à remonter les bateaux ». L’idée d’utiliser le courant lui-même, l’énergie hydraulique comme force motrice, elle aussi très ancienne, va s’imposer progressivement. Toutes les « machines » conçues ou pro­jetées sur ce principe sont connues sous le nom d’aquamoteur.

Toutes les « machines » conçues ou pro­jetées sur ce principe sont connues sous le nom d’aquamoteur. Les « inventeurs » pouvaient s’inspirer d’une pratique ancestrale mise en œuvre par les meuniers des moulins-nefs ; pour déplacer leur installation, ils avaient l’habi­tude d’enrouler leur câble d’amarrage sur l’axe des roues à aubes qui actionnaient les meules… Le principe était simple : si la roue à aubes pouvait permettre de remonter le moulin-nef, il devait être possible de concevoir une machine flottante capable de tracter des bateaux de charge. Plusieurs aquamoteurs vont être construits en France sur ce principe aux XVIIIe et XIXe siècles.

L’aquamoteur du pont neuf

A Paris, l’étranglement progressif du lit majeur est particulièrement spectaculaire puisque au XVIIe siècle on constate une différence du niveau de l’eau entre l’amont et l’aval de l’île de la Cité de l’ordre de 1 mètre ! Bien entendu, cela fait le bonheur de certains des « utilisateurs de la rivière » qui multiplient les moulins « pendants » et moulins-nefs et les pompes hydrauliques.

Par contre, les grandes « besognes » qui voulaient atteindre le pont Saint-Nicolas ou celui de l’École rencontraient d’immenses difficultés et devaient être remontés au cabestan depuis le pont Royal. Vers 1730, un premier aquamoteur est alors installé entre le Pont-Neuf et le pont au Change…